"L'expérience est le commencement de la sagesse."
- Alcman de Sardes -

Bonjour,
Aujourd'hui : "Gratuit ou payant ?"
Où l'on voit qu'en économie, il faut aller sur le terrain.

 

2006, au Kenya. Dans une clinique, une association distribue gratuitement des moustiquaires aux femmes enceintes. Mais à quelques kilomètres, dans une autre clinique, la même association vend les mêmes moustiquaires 40 shillings kenyan (0,30 euros). Un problème de coordination ? Pas du tout !

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L'hôpital national du Kenya, vers 2016, Nairobi, photo : DR

 

L'association lutte contre le paludisme, fièvre mortelle qui se transmet par piqûre de moustique. Et elle se demande si elle doit vendre, ou donner gratuitement, ses moustiquaires.

La réponse n'est pas si évidente. En effet, les économistes qui travaillent sur les questions du développement et de la pauvreté ne sont pas d'accord entre eux.

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Le Anopheles gambiae, l’un des moustiques transmetteurs du paludisme, 2008
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Certains préconisent une aide financière massive contre la pauvreté : pour eux, il faut donner les moustiquaires gratuitement pour que tout le monde puisse se protéger au maximum.

D'autres estiment, au contraire, qu'il ne faut pas donner les moustiquaires : les gens vont les gaspiller, ou les revendre, et l'on prive peut-être des entrepreneurs locaux de l'opportunité de fabriquer et vendre des moustiquaires...

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Une distribution de moustiquaires gratuites, 2017, Avrankou, photo : DR

 

Pour les partisans du payant, fixer un prix, c'est aussi donner de la valeur à la moustiquaire, et créer un "effet de sélection" : seuls ceux qui en ont vraiment besoin les achèteront, et les utiliseront correctement.

Vaste débat, mais cela n'aide pas l'ONG à décider ! Elle demande donc à deux chercheuses de trancher. Dans les cliniques du Kenya, ces universitaires appliquent une méthode de l'économiste française Esther Duflo : les expériences aléatoires.  

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Esther Duflo, 2011, photo : Center for Global Development
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On constitue plusieurs groupes de femmes au hasard. Dans une clinique, on offre les moustiquaires à un groupe. Dans d'autres, on les vend, à différents niveaux de prix. 

Résultat : les femmes qui ont eu les moustiquaires gratuitement les utilisent aussi bien que celles qui ont payé ! Il n'y a pas, dans ce cas précis, ni gaspillage ni "effet de sélection". Et la même expérience donne les mêmes résultats dans d'autres pays, comme à Madagascar.

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Illustration Économitips
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Bref, l'ONG est fixée : elle opte pour les moustiquaires gratuites.

Pour faire son choix, elle ne s'est pas basée sur telle ou telle théorie économique abstraite. Elle a simplement tenu compte de la réalité observée sur le terrain...

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Une distribution de moustiquaires pour les mères et jeunes enfants, 2019, Cameroun, photo : DR

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Un entretien avec Esther Duflo sur l’économie du développement à l’épreuve du terrain (vidéo)
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" L'expérience est le commencement de la sagesse. "

- Alcman de Sardes -

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