C’est très très bleu

"Charge-toi de peindre, et moi je me chargerai des couleurs."

Jean-Baptiste Guimet à son épouse Zélie Bidauld

Bonjour,
Aujourd'hui : "C’est très très bleu"
Où l’on découvre une nuance de bleu qui sent le soufre.

1824. La Société d’Encouragement pour l’Industrie Nationale lance un grand concours : qui parviendra à trouver la recette d’un pigment bleu outremer artificiel ?

Pour motiver les savants, la Société promet la jolie somme de 6000 francs ! Malheureusement, malgré ce prix alléchant, les candidats ne se bousculent pas…

Pigment bleu outremer naturel à base de lapis-lazuli, photo : Palladian
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La mission est loin d’être anodine. Le fameux bleu outremer, connu depuis l’Antiquité, est un pigment effroyablement coûteux. Sa nuance profonde et lumineuse est obtenue en broyant une pierre semi-précieuse, le lapis-lazuli, puis en lui retirant toutes ses impuretés.

Autant d’opérations qui rendent ce pigment plus cher que l’or ! Rares sont les peintres qui peuvent se permettre de l’utiliser, d’où l’intérêt de pouvoir le reproduire artificiellement.

Johannes Vermeer, La Laitière, vers 1660, huile sur toile, 45 cm x 41 cm, Rijksmuseum, Amsterdam. La jupe de la laitière est peinte avec de l'outremer naturel.
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Mais le concours patine : il est renouvelé deux ans de suite, faute de participants, et ceux qui s’y frottent présentent des bleus chimiques aux nuances trop éloignées de l’outremer. C’est finalement l’ingénieur lyonnais Jean-Baptiste Guimet qui tente sa chance.

Poussé par son épouse, la peintre Zélie Bidauld, il met au point une recette à base de soude et de soufre.

Jean-Baptiste Danguin, Jean-Baptiste Guimet, 19^e siècle, gravure, photo : Welcome images
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La nuance obtenue, d’un bleu profond, répond également à une autre demande du jury : un coût de fabrication très bas. Guimet remporte le prix !

Son "bleu Guimet" est un succès mondial. Le pigment, tendre, stable et très couvrant, est tout de suite adopté par les peintres.

Jean-Auguste-Dominique Ingres, L’Apothéose d’Homère, 1827, huile sur toile, 386 x 512 cm, Musée du Louvre, Paris. La toge bleue du personnage (à gauche) est peinte avec du bleu Guimet.
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Et il a d’autres usages : grâce à un procédé optique appelé "azurage", il permet de rendre le linge et le papier plus blancs.

Bleu Guimet pour l'azurage du linge, pastille commercialisée à Dijon de 1869 à 1911 par la Manufacture de bleu d'outremer de Louis Robelin, photo : Cquoi
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Le fils de Jean-Baptiste, Émile, reprendra la prospère entreprise familiale. Et il saura dépenser toute cette fortune : voyageur et collectionneur passionné par les cultures asiatiques, il abritera toutes ses œuvres dans un musée qui, encore aujourd'hui, porte son nom.

Musée national des Arts asiatiques - Guimet, construit en 1889 par l'architecte Jules Chatron, Paris, photo : Mbzt
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Pour en savoir plus :

Sur l’invention du bleu outremer artificiel

Sur Jean-Baptiste Guimet

Sur l’histoire du bleu outremer (vidéo)

Sur le bleu de Prusse, autre célèbre bleu artificiel
Partenariat Artips / Beaux Arts magazine

Yves Klein, Monochrome bleu, 1961, pigment sur coton contreplaqué sur bois, The Metropolitan Museum of Art © Succession Yves Klein c/o ADAGP, Paris, 2021. Le "bleu Klein" a été créé à partir de pigment bleu outremer artificiel.
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Alors, plutôt bleu outremer, bleu de Prusse ou bleu Schtroumpfs ? Pour continuer à explorer cette couleur pas comme les autres, Sciencetips, la petite sœur d'Artips, vous proposait hier de faire la connaissance de gens tout bleus... littéralement !

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