"La poésie ne doit pas périr. Car alors, où serait l’espoir du monde ?"

Léopold Sédar Senghor

Bonjour,
Aujourd'hui : "Une petite signature, s’il vous plaît"
Où l’on se révolte avec des pots de céramique et des vers de poésie.

 

2020, États-Unis. Dans une salle de vente, on retient son souffle. De nombreux musées se disputent un objet mis aux enchères. Pourtant, il ne s’agit pas d’un tableau d’un maître reconnu mais… d’une jarre en céramique ! Pourquoi les intéresse-t-elle autant ?

Illustration Artips
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Tout d’abord, cette œuvre, réalisée par un esclave du 19e siècle, impressionne par sa qualité. L’artiste David Drake, surnommé "Dave le Potier", était particulièrement habile. Ses pièces, parfois énormes, représentent un vrai tour de force.

Drake travaille l’argile à la main. Puis il couvre ses pièces de glaçure pour leur donner un aspect brillant. Il n’hésite pas à laisser des coulures apparentes, pour rendre ses pièces encore plus belles.

David Drake, Jarre avec l’inscription "Catination", 1836, grès émaillé, 37,5 x 32,1 cm, Musée des Beaux-Arts de San Francisco
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Dans sa région de Caroline du Sud, sa virtuosité est si connue que de nombreux visiteurs viennent admirer sa "touche magique" !

À l’époque, beaucoup d’esclaves, comme lui, travaillent dans des usines de production de céramique. Mais si "Dave" passionne les musées, c’est qu’il est le seul à signer ses œuvres. Plus incroyable encore, il va jusqu’à écrire des poèmes pleins d’esprit sous le rebord de ses pièces.

En haut : David Drake, Jarre, 1857, grès émaillé, 48,3 x 45,1 cm, Musée des Beaux-Arts de Boston
En bas : Détail de l’inscription : "I made this Jar for Cash / though it's called lucre trash. Dave", poème qu'on pourrait traduire par "J'ai fait ce Pot contre de la Monnaie / même si c'est un déchet intéressé. Dave".
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Or, Drake prend des risques. Au 19e siècle, on interdit aux esclaves de lire et d’écrire. On craint que cela ne les pousse à la révolte. Pour l’artiste, signer et rédiger de la poésie, c’est donc un vrai acte de résistance.

Étudiants de couleur exclus des écoles, illustration extraite de The American Anti-Slavery Almanac, 1839, Bibliothèque John Hay, Providence
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À demi-mots, Drake évoque ainsi la souffrance de sa condition : "je me demande où sont passées toutes mes relations". Mais il conclut avec optimisme : "Amitié avec tous et toutes les nations".

L’artiste a eu raison de ne pas désespérer. Il voit l’abolition de l’esclavage et finit donc sa vie, libéré de ses chaînes ! Il laisse derrière lui de nombreuses poteries et des poèmes qui témoignent de son courage… et que s’arrachent les musées aujourd’hui.

Mary Edmonia Lewis, Forever free, 1867, marbre, 104,7 x 27,9 x 43,1 cm, Howard University Gallery of Art, Washington D.C.
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Ne tournez pas autour du pot...
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Pour en savoir plus sur David Drake, 2017 (vidéo en anglais)

" La poésie ne doit pas périr. Car alors, où serait l’espoir du monde ? "

- Léopold Sédar Senghor -

Racontée par Adeline Pavie

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