Avril 1812, Paris, église de la Madeleine. Les cloches sonnent : Pauline de Meulan, écrivaine, vient de dire "oui" à François Guizot, professeur d'histoire. Un mariage comme les autres ? Pas vraiment...

Certes, Pauline de Meulan a 14 ans de plus que François. Mais à l'époque, c'est courant : de jeunes bourgeois épousent parfois de riches aristocrates plus âgées, pour devenir nobles à leur tour et, surtout, pour recevoir une belle "dot".

La dot, c'est une vieille tradition qui veut que la femme apporte à l'époux de l'argent ou des biens.

Claude-Louis Desrais, Façade de l'église de la Madeleine, vers 1811-1815, dessin, 28 x 20 cm, Musée Carnavalet, Paris
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Le Code civil de 1804 dit que la dot est la contribution, unique et initiale, de la femme à la charge du mariage. Ensuite, c'est au mari de travailler pour faire vivre la famille.

Les jeunes femmes sans fortune sont ainsi considérées comme incasables. À tel point qu'on organise parfois des collectes publiques pour les "doter" et attirer les prétendants !

Jean-Baptiste Greuze, L'accordée de village, 1761, huile sur toile, 92 x 117 cm, Musée du Louvre, Paris
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Pas très romantique tout ça… En effet, certains économistes considèrent, en matière amoureuse, que les individus font leurs choix en fonction de calculs savamment dosés.
L'Américain Gary Becker a ainsi analysé la formation des couples comme un "marché matrimonial", un lieu d'échange de biens et de services comme un autre !

Gary Becker, vers 2006, photo : DR

Selon lui, pour se mettre en couple,
les individus examinent "l'offre" proposée, en regardant les qualités du conjoint potentiel (beauté, intelligence, humour…).

Puis ils analysent "l'utilité" de l'union - partager les revenus et les dépenses par exemple - qu'ils comparent avec "le coût" (les inconvénients) de vivre à deux. Et ils prennent leur décision finale en fonction de ce raisonnement !

François Guizot a-t-il calculé ainsi ? Se marie-t-il avec Pauline pour sa dot et sa particule ?

Illustration Économitips
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Non ! Eux, c'est différent : Pauline est une femme indépendante, qui travaille pour gagner sa vie, car sa famille n'a pas de fortune.

Résultat : François aura zéro dot, mais il s'en fiche. Les Guizot s'aiment et vivront heureux, sans dot mais avec deux belles sources de revenus, puisque monsieur sera ministre et madame écrivaine à succès !

À gauche : Louis-Charles Auguste Couder, Mme Guizot, vers 1835-1836, lithographie, 49 x 33 cm, Musée Carnavalet, Paris
À droite : Jehan Georges Vibert, François Guizot, vers 1801-1878, huile sur toile, 100 x 81cm, Musée national des châteaux de Versailles et de Trianon, Versailles
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Pour en savoir plus :

La dot n’a disparu du Code civil qu’avec la création des régimes matrimoniaux… en 1965 ! Aujourd’hui, la situation change : les femmes travaillent plus et les conjoints partagent davantage les revenus, et les dépenses. France Stratégie parle ainsi d’une "redistribution privée" au sein des couples, qui permet d’atténuer les inégalités.

Oui mais voilà : séparations, familles mono-parentales, choix du célibat... de moins en moins de gens vivent en couple. Alors que devient cette redistribution ? Réponses dans une note récente : "Le couple contribue-t-il encore à réduire les inégalités ?".

Regarder la vidéo Le couple contribue-t-il encore à réduire les inégalités ?, Datagora - France Stratégie (vidéo)