1671, Paris. Le grand peintre Charles Le Brun donne une conférence. Et comme il n’existe pas encore de diapositives ou de PowerPoint, il illustre son propos grâce à ses propres dessins. On y voit des humains aux visages étranges, voire complètement monstrueux !

Charles Le Brun, Quatre têtes d'hommes en relation avec le singe, XVIIe siècle, dessin, 216 x 327 cm, Musée du Louvre, Paris, photo : © RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Thierry Ollivier
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Des nez en forme de bec, des mentons qui deviennent des museaux… Le très sérieux Charles Le Brun se serait-il reconverti dans la caricature ? Pas du tout ! Ses dessins sont en réalité dans le thème de sa conférence : les liens entre l’apparence humaine et animale.

Charles Le Brun, Trois têtes d'hommes en relation avec le chat-huant, XVIIe siècle, dessin, 231 x 318 cm, Musée du Louvre, Paris, photo : RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / image RMN-GP
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Car des expressions comme "un regard bovin" ou "fier comme un coq" ne datent pas d’hier. Cela fait bien longtemps que l’on associe aux animaux des traits de caractère très humains : le lapin serait craintif, le lion courageux, le renard rusé.
Un homme qui ressemblerait à l’un de ces animaux en prendrait donc immédiatement le caractère… CQFD !

C’est ce qu’on appelle la physiognomonie : on pourrait connaître à coup sûr le caractère d’un homme juste en observant sa figure. Bien qu’elle n’ait aucun fondement scientifique, cette théorie reste très populaire pendant des siècles.

André Le Grand, d'après Charles Le Brun, Deux têtes de renard et trois têtes d'hommes en relation avec le renard, 1806, estampe, 500 x 650 cm, Ateliers d'art des musées nationaux, moulage et chalcographie, Saint-Denis, photo : © RMN-Grand Palais / René-Gabriel Ojéda
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À la fin du XIXe siècle, un criminologue s’en sert pour expliquer que des bras très longs, comme ceux des singes, annoncent des tendances criminelles…

Et en 1924, dans son film La Grève, le cinéaste Eisenstein utilise exactement le même procédé. Au début du film, il présente une galerie de mouchards, chargés de dénoncer des grévistes.

Sergueï Eisenstein, 1910, photographie
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En référence à Le Brun, le voilà qui superpose des visages d’hommes à des faces d’animaux. Un renard, un singe, ou encore un hibou, que des bêtes qui n’ont pas une très bonne réputation. De quoi montrer tout de suite leur caractère perfide !

Sergueï Eisenstein, La Grève, 1924 (vidéo)
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Pour en savoir plus :

Charles Le Brun n’est pas le seul artiste à avoir inspiré le génial cinéaste Sergueï Eisenstein…
Ce dernier, pour nourrir son imaginaire et son incroyable inventivité, a puisé dans les cultures du monde entier !

Le Centre Pompidou-Metz décrypte ses œuvres dans une exposition passionnante, L’Œil extatique. Sergueï Eisenstein, cinéaste à la croisée des arts, à voir jusqu'au 24 février 2020 !

Voir la bande-annonce de l'exposition, photo : Eisenstein montant Octobre, 1927. RGALI, 1923/1/217, f.1 © Russian State Archives of Literature and Art