2018, Wilamaya Patjxa (Pérou). L’archéologue Randall Haas s’extasie devant sa récente découverte : la tombe d’un individu enterré il y a 9 000 ans.

La sépulture comprend quelques ossements et une grande collection d’outils : des pointes pour abattre un mammifère de grande taille, des couteaux pour découper la viande, des pierres lourdes pour briser les os… Le parfait kit du chasseur !

Une femme de 17 à 19 ans avec une trousse à outils de chasse in situ datant de - 9000 ans (A) Photographie (B) Carte montrant les positions des matériaux squelettiques et des objets funéraires associés. (C) Outils, photo : Randall Haas © Université de Californie, Davis
Voir en grand

Pour Randall, pas de doute, l’individu devait être un homme adulte, un excellent chasseur et une figure importante au sein de son clan. Pourtant, une surprise de taille l’attend… L’analyse des dents révèle que l’individu était en réalité… une jeune femme ! Mais alors, les femmes chassaient-elles, elles aussi, le gros gibier ?

Illustration Sciencetips
Voir en grand

La découverte remet en cause une hypothèse admise depuis le 19^e siècle : les hommes chassaient le gibier et les femmes se consacraient à la cueillette. Après tout, la grossesse et le soin des enfants empêchaient sûrement les femmes de participer à la chasse… Alors, cette jeune femme était-elle une exception ou la norme ?

Salle des Taureaux, peinture pariétale paléolithique, vers 17 000 av. J.-C., Grotte de Lascaux, Dordogne
Voir en grand

Pour le savoir, Randall décide de passer en revue les sépultures de la même période (du Pléistocène supérieur et de l’Holocène inférieur) découvertes dans l’ensemble des Amériques.

Il constate que sur 27 individus (dont le sexe biologique a pu être déterminé), enterrés avec leurs outils de chasse, 11 étaient des femelles et 16 étaient des mâles. Bref, pour Randall, entre 30 et 50% des chasseurs auraient été des femmes !

Ilustration sciencetips
Voir en grand

Eh oui, la chasse du gros gibier aurait nécessité la participation de tous les individus capables du clan, et ce quel que soit leur sexe biologique !

Ainsi, l’utilisation du propulseur (le dispositif qui permettait de propulser une lance ou une sagaie à longue distance) pouvait être enseignée tôt, avant que les femmes ne soient en âge de procréer. Et les mères pouvaient confier les enfants à la communauté. De quoi déconstruire quelques clichés !

Pour en savoir plus sur le rôle des femmes à la préhistoire par Marylène Patou-Mathis, 2020 (vidéo)

Pour en savoir plus :

"Non ! Les femmes préhistoriques ne passaient pas leur temps à balayer la grotte !" Voilà comment débute le livre L'homme préhistorique est aussi une femme, de la préhistorienne Marylène Patou-Mathis. Et si elles aussi avaient peint Lascaux, chassé les bisons, taillé des outils, inventé des techniques… 

Pour entendre la chercheuse, et tout savoir sur les femmes préhistoriques, un seul endroit : la conférence "Le rôle des femmes préhistoriques : nouveau regard" à la Cité des sciences et de l’industrie à Paris, le mardi 30 novembre 2021 à 19h. L’accès est gratuit et sans réservation. Pour suivre la conférence en direct, c'est par ici !

Pour en savoir plus sur les conférences "Les récits"