Il pleut, il mouille…

"Le biologiste passe, la grenouille reste."

Jean Rostand

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Bonjour,
Aujourd'hui : "Il pleut, il mouille…"
Où l’on découvre le super pouvoir de la peau de grenouille.

1960, Kolomna (Russie). Le jeune Albert Lebedev écoute étonné le récit des anciens de son village natal. Ils racontent qu'avant l’arrivée du réfrigérateur, ils mettaient une grenouille vivante dans le lait frais de la ferme pour éviter qu’il ne tourne.

Et pas n’importe laquelle, une grenouille locale, Rana temporaria. En dehors de la pratique peu ragoûtante, comment un amphibien pourrait-il permettre de conserver le lait ?

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Des années plus tard, son diplôme de chimiste en poche, Albert se penche à nouveau sur la question. Avec ses collègues, ils décident d’analyser la peau de la petite grenouille brune. Et bien leur en prend. Ils découvrent que cette dernière contient de nombreuses substances antimicrobiennes.

Grenouille Rana temporaria mâle, photo : Holger Krisp
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Ces composés, naturellement sécrétés par l'épiderme de la grenouille, l'aident à se défendre contre les micro-organismes (bactéries, champignons…) présents dans les espaces humides de son environnement.
Ce sont ces substances qui agissent lorsque l'on plonge Rana temporaria dans le lait. Elles ralentissent le développement des bactéries responsables de la fermentation du lait. Mais de quelles substances antimicrobiennes s'agit-il réellement ?

Lactobacillus paracasei, bactéries lactiques couramment utilisées dans la fermentation des produits laitiers, image colorisée observée au microscope électronique à balayage, photo : Horst Neve, Max Rubner-Institut
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En poussant ses recherches, Albert découvre que la peau de l'amphibien contient en réalité près de… 76 composés différents ! Ce sont des molécules antibactériennes, antivirales et même antifongiques (contre les champignons).

Il s'agit plus spécifiquement de "peptides antimicrobiens", de courtes chaînes d'acides aminés (les éléments de base constituant les protéines).

Images au microscope électronique à balayage montrant l'action d'un peptide antimicrobien sur la membrane cellulaire de la bactérie E. coli. En haut : Membranes cellulaires intactes du groupe témoin / En bas : Membranes cellulaires endommagées et fuite du chromosome bactérien (vert)
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Certains de ces peptides ont la même efficacité que les antibiotiques utilisés contre la Salmonelle (bactérie qui provoque des intoxications alimentaires) ou le Staphylocoque (bactérie responsable d’infections cutanées).

Salmonella typhimurium, en rouge, sur une culture de cellules humaines, photo : Rocky Mountain Laboratories, NIAID
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Sans aller jusqu'à mettre des grenouilles dans les verres d’eau des malades, les scientifiques tentent de mettre au point des traitements à base de ces fameux peptides, notamment contre les souches bactériennes résistantes aux antibiotiques.

La bave de crapaud n'atteint peut-être pas la blanche colombe, mais la peau de grenouille pourrait, elle, bien nous sauver un jour.