Ça gratte !

"Quand un mille-pattes veut se suicider, il lui suffit de passer sur un pont en marchant au pas cadencé."

François Cavanna

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Bonjour,
Aujourd'hui : "Ça gratte !"
Où l’on découvre un remède à base de jus de mille-pattes.

2016, forêt de Kirindy, Madagascar. Dissimulée derrière un arbre, la jeune éthologue Louise Peckre observe discrètement un petit groupe de primates, des lémuriens à front roux (Eulemur rufifrons).

L'une des femelles retient tout particulièrement son attention. Très agitée, elle frotte son pelage avec une sorte de bâton rouge.

Lémurien à front roux (Eulemur rufifrons), photo : Bernard Dupont
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Pas un bâton, non… un diplopode (Sechelleptus) ou plus simplement un mille-pattes ! Après l’avoir mâchouillé quelques secondes, libérant un jus orange peu ragoûtant, la voilà qui frotte frénétiquement l’animal contre sa queue, ses parties intimes et son anus !

Un diplopode (Sechelleptus), photo : dronepicr
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La femelle aurait-elle perdu l’esprit ? D’autant que ce mille-pattes est loin d’être inoffensif : lorsqu’il se sent en danger il produit une substance toxique, la benzoquinone. Alors pourquoi un tel comportement ?

Femelle adulte mordant un mille-pattes en se frottant la queue (a) et la région périanale (b), photo : © Peckre et al, 2018
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Serait-ce pour débarrasser le mille-pattes de sa toxine avant de le consommer ? Peu probable, les lémuriens ne les mangeant pas systématiquement. Et s’il s’agissait d’automédication ? Eh oui, à leur grand désarroi les lémuriens à front roux ont souvent… des vers !

Ces petits parasites, présents dans leur système digestif, leur provoquent de fortes démangeaisons au niveau de la région périanale (autour de l’anus, en somme). Or la benzoquinone, produite par les mille-pattes, est un excellent antiparasitaire !

Illustration Sciencetips
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En se frottant les parties génitales et l’anus, les lémuriens à front roux tuent les œufs des vers, empêchant ainsi leur propagation dans le reste du groupe.

Mais ce n’est pas tout. Après s’être badigeonnés, ils ingèrent parfois le mille-pattes, permettant ainsi de bloquer la croissance des vers adultes présents dans leur système digestif.

À force de se gratter pour calmer les démangeaisons, certaines zones du pelage perdent leurs poils, photo : © Peckre et al, 2018
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Et si l’ingestion des mille-pattes reste dangereuse à long terme pour leur santé, la possibilité de se débarrasser de leurs bien gênants colocataires l’emporte haut la main.

D’autant qu’il semblerait que le jus de mille-pattes ait également une utilité récréative : la toxine a un effet psychotrope ! Ne dit-on pas malin comme un singe… ou ici un primate ?