Jean-Antoine Houdon, L'Hiver dit La Frileuse, 1783, marbre, 145 x 57 x 64 cm, Musée Fabre, Montpellier. Photo : Musée Fabre
1785. L’Académie royale organise son Salon, l’exposition la plus prestigieuse de Paris. Pour le sculpteur Jean-Antoine Houdon, c’est l’occasion rêvée de montrer ses dernières créations au public. Hélas, son Hiver ne fait pas l’unanimité chez les organisateurs. Pire encore, le directeur de l’Académie suggère de présenter le marbre, mais... "caché dans un coin" ! Quel est le problème ?
Houdon a pourtant choisi un sujet traditionnel : l’allégorie, c’est-à-dire la figuration humaine, d’une saison. Mais si on trouve généralement l’Hiver sous la forme d’un vieillard barbu, Houdon a préféré sculpter une jeune femme dénudée. Seulement couverte d’un châle sur la tête, elle semble claquer des dents, alors que le gel a déjà brisé un vase à ses pieds.
Justement, les autorités la trouvent inconvenante : selon le directeur de l’Académie, "une figure entièrement nue" est même moins indécente que "celles qui sont drapées avec une fausse modestie".
Sa proposition de l’exposer dans un coin n’est pas retenue : la statue est tout bonnement refusée ! En effet, elle va à l'encontre des politiques de l’époque qui tentent de promouvoir un art moral, qui élève les spectateurs.
François Girardon d'après un dessin de Charles Le Brun, L'Hiver, 1675-1679, marbre, jardins du Château de Versailles
Houdon ne se laisse pas abattre. C’est dans son propre atelier que sa Frileuse, comme on l’appelle, est présentée aux curieux. Et ça marche ! Pour répondre à la demande des amateurs, l’artiste doit en faire de nombreux exemplaires, en marbre comme en bronze. Le succès est tel que des contrefaçons circulent même sur le marché...
L’histoire ne s’arrête pas là : en 1791, en pleine Révolution, le Salon est devenu libre. Plus besoin d’obtenir l’accord de l’Académie ! Houdon expose enfin son Hiver. Et si un critique note malicieusement que le sujet n’est qu’un prétexte pour présenter une nudité car "quand on a froid (...), on se couvre plutôt le corps que la tête", Houdon est salué de tous. Il tient sa revanche!
À gauche : Fonderie Barbedienne, d'après Jean-Antoine Houdon, La Frileuse, 1876-1910, bronze doré, collection privée. Photo: Proantic. À droite: Jean-Antoine Houdon, La Frileuse, 1787, bronze, Metropolitan Museum of Art
Louis-Léopold Boilly, L'Atelier de Houdon, vers 1804, huile sur toile, 88 x 115 cm, Musée des Arts décoratifs, Paris
"Quand le cœur est chaud, on n’a pas froid au corps". Lao She
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