Où les impressionnistes prennent leur mal en patience.
1874, Paris. Le groupe des impressionnistes est très déçu. Leur première exposition vient de se terminer. Les visiteurs n’étaient pas au rendez-vous, les critiques les ont assassinés, et même le terme "impressionnisme" a été inventé pour se moquer d’eux.
C’est un désastre ! Morisot, Monet, Renoir, Sisley… tous veulent connaître le succès. Mais comment faire ?
Henri Fantin-Latour, Un atelier aux Batignolles, 1870, huile sur toile, 204 x 273 cm, Musée d'Orsay, Paris
Pierre-Auguste Renoir, Portrait de Paul Durand-Ruel, 1910, huile sur toile, 65 x 55 cm, collection privée
L’idée, c’est Renoir qui la trouve : organiser une vente aux enchères de leurs propres œuvres. Cela leur permettrait de redorer leur image, et de sortir la tête de l’eau. Certains d’entre eux ont en effet cruellement besoin d’argent.
Aussitôt dit, aussitôt fait ! La vente est organisée à l’Hôtel Drouot, début 1875. Plusieurs artistes impressionnistes proposent leurs tableaux, et les estimations sont fixées par Paul Durand-Ruel, un célèbre marchand d’art. Tout est fait pour que cette vente soit une réussite.
Mais ce n’est malheureusement pas le cas : les enchères sont rares et peu élevées. L’ambiance, quant à elle, est quelque peu tendue. Défenseurs et adversaires des impressionnistes s’affrontent dans un brouhaha général. Le ton monte, à tel point que la police est obligée d’intervenir…
Avec un tel chahut, la vente est un échec.Les œuvres partent à prix cassés : au total, les soixante-treize peintures présentées rapportent moins de douze mille francs, soit moins qu’un seul tableau d’un peintre à la mode. Berthe Morisot obtient la plus haute enchère, mais cela reste dérisoire.
Claude Monet, Les déchargeurs de charbon, 1875, huile sur toile, 54 x 65 cm, Musée d'Orsay, Paris. Une des œuvres de la vente de 1875.
Berthe Morisot, L'ombrelle verte (Edma), 1873, huile sur toile, 46 x 72 cm, Cleveland Museum of Art, Cleveland. Une des œuvres de la vente de 1875.
Cette vente a tout de même permis à certains de ces artistes d’attirer l’attention d’amateurs d’art. Malgré leur déception, les impressionnistes ne renoncent pas. Heureusement, car vingt ans plus tard, ils deviennent incontournables. Leurs tableaux se vendent désormais à prix d’or !
" Le succès, c'est l'échec de l'échec. " Delphine Lamotte