Où l’on découvre comment taper dans l’œil de son amoureux.
Joshua Reynolds, Portrait de Maria Fitzherbert, vers 1788, huile sur toile, 91 x 71 cm, National Portrait Gallery, Londres
1785. Maria Fitzherbert vient de recevoir un précieux colis dont l’expéditeur n’est autre que le prince de Galles ! L’héritier du trône anglais, fou amoureux de la jeune femme, est prêt à tout pour la convaincre de l’épouser. Il espère bien que son cadeau fera mouche auprès de la dame de son cœur...
Autre cadeau offert à Maria Fitzherbert par le prince de Galles, 1800, glaçure sur ivoire et diamants, 17 x 15 cm, collection privée
Quand Maria déballe son colis, surprise ! Elle découvre untableau miniature qui représente l’œil droit du prince. Celui-ci en a passé commande à un artiste célèbre de l’époque, spécialisé dans les portraits de petite taille, un certain Richard Cosway. Mais pourquoi se focaliser uniquement sur un œil ? Pour le prince, il s’agit en fait de représenter leregard tendre qu’il porte sur Maria.
Anonyme, Miniature d'œil, entre 1790 et 1820, Victoria and Albert Museum, Londres
Il n’est d’ailleurs pas le premier à penser à ce genre de cadeau. Les premiers tableaux d’yeux auraient été réalisés quelques années plus tôt enFrance. Mais c’est bien le prince qui lance la mode en Angleterre : bientôt les couples s’offrent ces étranges portraits lors de leurs fiançailles ou après le mariage. Cela permet de ressentir le regard de la personne aimée, même éloignée.
Miniatures d'yeux, vers 1820, collection David and Nan Skier, via Vanity Fair
Par la suite, on se met même à commander des tableaux d’yeux des défunts pour garder leur mémoire. Ces portraits intimes, peints sur des morceaux d’ivoire, sont souvent insérés dans des bijoux comme des broches pour être portés sur soi en permanence. On porte ainsi l'être aimé près du cœur !
Miller Bros. Studio, Photo de mariage, vers 1880
Les Lover’s Eyes ("Yeux de l'être aimé"), comme on les appelle aujourd’hui, ont connu un grand succès au début du 19e siècle. Mais la mode passe assez vite : dès les années 1840, il devient plus facile d’avoir des portraits grâce... à la photographie !
Mais revenons à notre histoire d’amour : le prince a-t-il convaincu Maria Fitzberbert de l’épouser grâce à son présent ? On l’imagine car les deux amoureux se sont mariés peu après... dans le plus grand secret !