Thomas Willeboirts Bosschaert, Portrait de Balthasar Moretus, 1613-1641, huile sur toile, 66 x 51 cm, Musée Plantin-Moretus, Anvers
Années 1630, Anvers. Balthasar Moretus a un grand projet : il veut faire réaliser les portraits de ses ancêtres. Et cela tombe bien, son ami d’enfance n’est autre que le célèbre peintre Rubens...
Il faut dire que la famille de Balthasar mérite le meilleur. Ses grands-parents maternels ont fondé l’Officina Plantiniana, la plus grande maison d’édition d’Europe. L’entreprise inonde le marché de ses ouvrages de grande qualité, parfois ornés par Rubens en personne.
Et en rendant hommage à sa lignée, Balthasar n’oublie pas les femmes, essentielles au succès familial. Parmi elles, sa mère, Martina Plantin, occupe une place de choix. Pour cause : en plus de maîtriser le latin, le grec et l’hébreu, d’être correctrice dans l’Officina et de gérer une boutique de dentelle, elle prend la direction de l’entreprise à la mort de son mari. Autant dire qu’elle ne devait pas s’ennuyer !
Mais au moment où Rubens doit faire son portrait, cette femme d’affaires redoutable est déjà décédée depuis une quinzaine d’années…
Pour être fidèle à Martina, l’artiste s’appuie donc sur des témoignages de ses proches. Il lui attribue une tenue sombre, signe de respectabilité. Si ces vêtements paraissent simples, ils sont en fait coupés de manière raffinée. Cela va de pair avec une lourde chaîne en or, une fraise bouffante (autour de son cou) et une fine dentelle qui montrent de manière subtile que Martina vient d’une famille prospère. Enfin, son visage sévère témoigne de sa dignité.
Tous ces symboles vont dans le même sens : Rubens ne cherche pas vraiment la ressemblance physique. Il veut surtout commémorer la stature et la réussite de Martina.
Pierre Paul Rubens, Portrait de Martina Plantin, 1633, huile sur toile, musée Plantin-Moretus, Anvers
Détail de l'œuvre
Ainsi, Balthasar peut accrocher avec dévotion les portraits de sa mère et de ses ancêtres au sein même de l’Officina, pour perpétuer la mémoire de ceux et celles qui ont servi l’entreprise familiale. Et ils s’y trouvent toujours aujourd’hui, même s’ils veillent désormais sur... un musée!
"Il importe en peinture, que le portrait ressemble au modèle, mais non pas le modèle au portrait." Paul-Jean Toulet
En savoir plus
Eh oui, si l’Officina Plantiniana n’imprime plus de livres, elle existe toujours à travers le Musée Plantin-Moretus qui retrace l’histoire incroyable de cette entreprise qui a fait circuler le savoir dans toute l’Europe.
C’est à Anvers, en Flandre, que l’on peut toujours visiter la maison des Plantin-Moretus. Et en ce moment, la passionnante exposition "Affaires de femmes / Femmes d’affaires" retrace le rôle que les femmes ont joué au sein de cette dynastie d’éditeurs. Martina Plantin, Anna Goos, Anna Maria de Neuf... Grâce à leurs livres, leurs lettres et bien sûr leurs portraits, elles n’auront plus de secrets pour vous !
Sortez vos agendas : l’exposition se terminera le 11 janvier 2026.
Vue de l'exposition "Affaires de femmes / Femmes d'affaires". Photo : Sigrid Spinnox