Où l’on découvre qu’il faut être patient pour être l’ami de Poussin.
1650. Le collectionneurPaul Fréart de Chantelou est très heureux : après de nombreuses relances, son ami peintre va enfin lui envoyer son autoportrait !
Cet ami à qui Chantelou a passé commande n’est pas n’importe qui : il s’agit de Nicolas Poussin, alors installé à Rome et déjà considéré comme l’un des meilleurs peintres de son temps.
Posséder l’autoportrait de Poussin, ce serait le clou de sa collection.
Nicolas Poussin, La Manne, 1638, huile sur toile, 149 x 200 cm, ancienne collection de Paul Fréart de Chantelou, Musée du Louvre, Paris
Nicolas Poussin, Autoportrait, 1650, huile sur toile, 98 x 74 cm, ancienne collection de Paul Fréart de Chantelou, Musée du Louvre, Paris
Voilà pourquoi Chantelou, qui admire énormément le travail de son ami, le presse de se mettre au travail – d’autant qu’il a appris qu’un collectionneur rival a fait la même demande.
Lorsqu’il reçoit ces requêtes, Poussin est embarrassé : il déteste le genre du portrait! Un temps, il songe même à le faire exécuter par un collègue, mais l’artiste, trop exigeant, n’en trouve aucun d’assez doué pour se plier à l’exercice. La mort dans l’âme, après s’être fait prier pendant trois ans, il s’exécute enfin.
Poussin se représente donc la mine sévère, dans son atelier. Fidèle à sa réputation de peintre savant, il truffe sa toile de symboles qui ajoutent des sens de lecture à l’œuvre. En l’occurrence, il adresse plusieurs clins d’œil à son cher Chantelou…
Détail de l'œuvre
Dans ses mains, on peut voir les lettres de la correspondance qu’il entretient avec son mécène. Quant à la pierre taillée en pyramide qui orne sa bague, forme géométrique réputée la plus stable, elle symbolise la constance de leur amitié.
Et ce n’est pas tout : derrière l’artiste, une toile incomplète montre une jeune femme portant un diadème décoré d’un œil sur le front...
Elle n’est autre que l’allégorie de la Peinture savante, qui travaille avec sa raison. Enlacée discrètement par les bras de l’Amitié, elle salue le soutien indéfectible de Chantelou à son peintre. C’est grâce à lui que Poussin peut travailler comme il l’entend.
Chantelou ne s’y trompe pas: l’œuvre le ravit... au point qu’il la gardera précieusement avec lui tout le reste de sa vie!
En 2001, c'est un tout autre genre de "collectionneur" que Chantelou qui est arrêté par la police suisse...
Le dénommé Stéphane Breitwieser, un trentenaire alsacien plutôt discret, avoue avoir dérobé plus de 200œuvres d'art aux quatre coins de l'Europe. Le tout sans la moindre violence, mais avec une bonne dose d'audace!