1874, Prague. Le compositeur et chef d’orchestre Smetana vit un affreux cauchemar éveillé. Voilà qu’en quelques mois il est devenu complètement sourd. Pour un musicien, c’est évidemment une catastrophe. Que faire ?
S’il ne peut plus entendre, Smetana est donc incapable de diriger un orchestre ou de donner des cours. Le voilà obligé de démissionner…
Adieu à ses revenus ! Mais il ne compte pas se laisser abattre. Comme Beethoven avant lui, rien ne l’empêche de continuer à composer.
Joseph Karl Stieler, Portrait de Ludwig van Beethoven en train de composer Missa Solemnis, 1820, huile sur toile, 62 x 50 cm, Beethoven-Haus, Bonn
Bedřich Smetana, Vltava (La Moldau), vers 1874, partition, Bedřich Smetana Museum, Prague
Il se met alors à écrire à un rythme soutenu. Et pas des petits morceaux juste pour se distraire ! En moins de trois semaines, il achève une ambitieuse pièce intitulée Vltava… qui devient la plus célèbre de ses œuvres.
Elle est dédiée à la rivière du même nom, qui est une véritable icône tchèque. L’œuvre, patriotique, évoque par ses mélodies le mouvement de la fameuse rivière et les paysages typiques qu’elle traverse.
Malheureusement, malgré cette belle réussite, rien ne s’arrange pour Smetana. Des rivaux s’emparent de son ancien poste et ne sont pas tendres avec lui. En plus, il n’obtient qu’une petite pension de l’opéra où il travaillait.
František Dvořák, Bedřich Smetana entouré de ses amis, 1923, huile sur toile, 125 x 161 cm, collection privée (détail)
Il a au moins la chance d’avoir de très bons amis, qui organisent des concerts pour lever des fonds et le soutenir.
Mais les tentatives de Smetana pour se soigner ne font que creuser ses finances sans le soulager.
Affligé, le compositeur finit par comprendre qu’il ne retrouvera jamais l’audition. Il ne s’arrête pas pour autant et compose avec acharnement jusqu’à la fin de sa vie. Il a peut-être perdu l’ouïe, mais pas sa détermination, ni sa passion !
Bedřich Smetana, vers 1883, photographie
"Qu'importe la surdité de l'oreille, quand l'esprit entend ?" Victor Hugo