Où l’on fait compliqué alors que l’on peut faire simple.
Papier toilette avec un motif "pavage de Penrose"
Oxford, 1997. Le mathématicien Roger Penrose vient d'emménager dans une nouvelle maison. Dans les toilettes de celle-ci se trouve un rouleau de papier hygiénique laissé par les précédents occupants. Jusqu'ici, rien d’inhabituel ! Mais après inspection des feuilles ouatées, l’éminent scientifique reconnaît le motif qui les orne : un "pavage de Penrose", un agencement très spécifique qu'il a découvert et breveté près de vingt ans auparavant. Or, l’entreprise qui fabrique ces rouleaux ne lui a pas demandé son avis pour l’utiliser...
Quelle est donc la particularité de ce fameux pavage? Pour comprendre, prenons l’exemple d'un carrelage de salle de bain. Le modèle classique est constitué de tuiles carrées identiques, placées "périodiquement" au sol, c'est-à-dire de manière régulière et répétitive. Et cela marche avec toutes sortes de tuiles : triangulaires, hexagonales…
Mais trouver des pavages "apériodiques" (qui ne se répètent pas régulièrement) est un véritable défi mathématique. Et Penrose est tout bonnement le premier à avoir trouvé un exemple simple d’un tel agencement ! Pour cela, il a choisi des tuiles qui ont la forme de fléchettes et de cerfs-volants : pour recouvrir une surface, il est impossible de juste faire un "copier-coller" comme dans le cas périodique, il faut parfois se creuser la tête. Voilà le motif qu’a repris la société de papier toilette...
Pavage de Penrose
Roger Penrose debout sur le pavage de Penrose du foyer de l'institut Mitchell, Texas A&M University. Photo : Solarflare100, CC BY 3.0
Alors certes, le pavage de Penrose "triche" un peu car le scientifique utilise deux tuiles différentes. Il a fallu attendre 2023 pour que le premier exemple de pavage apériodique à une seule tuile soit enfin trouvé par les mathématiciens. Ces derniers commençaient d’ailleurs à douter de son existence.
Penrose, lui, intentera un procès à l'entreprise ayant copié son pavage sans son accord... lequel se termina à l’amiable. Mais cet exemple montre qu’il faut garder les yeux grands ouverts, même sur le trône : les mathématiques se cachent dans les recoins les plus insoupçonnés !