1819, Italie. Caché sous un grand chapeau, Stendhal regarde furtivement au coin d'une ruelle. Oui, la femme est bien là. L'écrivain se serait-il lancé dans l'espionnage ?
Non, il est… amoureux ! L’objet de son affection se nomme Matilde Viscontini Dembowski. Pour Stendhal, ce n’est autre que la plus belle, la plus intelligente, bref, la plus parfaite des femmes.
Illustration Sciencetips
Mary Cassatt, Jeune mère, 1900, pastel sur papier, 57 x 45 cm, Collection particulière
Cette idéalisation de l’autre, qui marque le début de toute relation amoureuse, est ce que l’auteur appellera plus tard la "cristallisation amoureuse".
Il s’avère qu’en plus d’être une belle idée, c’est également une réalité biologique : au premier temps d’une nouvelle relation, on ne perçoit pas les défauts de l'autre. Et c’est notre cerveau qui veut ça.
L’intérêt ? Faciliter le rapprochement et éventuellement la reproduction, nécessaire à la survie de l’espèce.
Voyons cela de plus près. Chaque fois qu’il voit Matilde, Stendhal rougit furieusement et a le cœur qui s’emballe. Il manque également d’appétit et ne parvient plus à dormir… un vrai supplice !
Représentations moléculaires de l'adrénaline et de la noradrénaline
Ces symptômes physiques sont loin d’être imaginaires. Les responsables sont de petites molécules chimiques, les "neurotransmetteurs" : l’adrénaline et la noradrénaline. Celles-là même que l’organisme sécrète face à une situation de stress.
En parallèle, un autre neurotransmetteur va entrer en jeu : la dopamine, ou "l’hormone du plaisir".
Cette dernière active dans le cerveau ce que l’on appelle le "circuit de la récompense". Résultat, on se sent bien… très bien !
Le circuit de la récompense : l'aire tegmentale ventrale (ATV) active, via la libération de dopamine, différentes zones du cerveau, illustration Sciencetips
Olof Johan Södermark, Marie-Henri Beyle dit Stendhal, 1840, huile sur toile, 62 x 50 cm, Musée du Château de Versailles et des Trianons, Versailles
Mais ce n’est pas tout. Être amoureux ferait aussi taire la partie de notre cerveau en charge du jugement.
C’est pour cela que l’on trouverait l’autre parfait et que l’on chercherait sa compagnie à tout prix... quitte à se cacher pour l’observer, comme Stendhal. Car, malheureusement pour lui, son coup de foudre n’est pas réciproque.
Eh oui, notre cerveau n’a pas encore trouvé la recette du philtre d’amour !
"Quiconque doit aimer aime à première vue."
William Shakespeare