Où l’on rencontre un mollusque qui n’est pas né de la dernière pluie.
2006, le long des côtes islandaises. Deux Britanniques se promènent sur la plage, glanant des coquillages. Mais ils sont loin d’être en vacances ! Les deux chercheurs sont venus récolter des mollusques dans le cadre d’une étude. L’un d’eux ramasse une praire d’Islande, espèce cousine de la palourde, qu’ils s’apprêtent à examiner de très, très près...
Praire d'Islande. Photo : Hans Hillewaert, CC BY SA 4.0
Détail d'une praire d'Islande. Photo : Manfred Heyde, CC BY SA 3.0
En effet, pour donner un âge à ce mollusque bivalve (à deux valves, donc), il faut compter minutieusement les stries de croissance présentes sur sa coquille : on pratique la sclérochronologie. Ces stries se forment au rythme d’une par an, un peu comme les arbres. Grâce à cette méthode, on découvre l’âge vénérable de cette praire : 507 ans ! Une longévité qui lui vaut d’être baptisée Ming, du nom de la dynastie chinoise en place lors de sa naissance en 1499. C’est l’un des plus vieux animaux au monde. Quel est donc son secret ?
Tout d’abord la zen attitude ! Eh oui, dans les fonds océaniques à 500 mètres de profondeur, Ming a un mode de vie plutôt calme et exempt de stress… Elle a aussi peu de prédateurs à ses trousses. Mais surtout, elle sait retarder le processus de vieillissement ! Selon les hypothèses des chercheurs, cette performance génétique se situerait au niveau de ses mitochondries.
À l’intérieur de nos cellules, les mitochondries assurent la respiration cellulaire (série de réactions chimiques qui transforment le glucose en énergie). Alors, quoi de particulier dans celles de la praire ? Les membranes de ses mitochondries auraient une résistance face aux "radicaux libres", des molécules responsables de la dégénérescence des cellules qui se forment lors de la respiration cellulaire. Les cellules de la praire étant moins vite abimées par les radicaux libres, elle peut vivre longtemps !
Schéma de la respiration cellulaire
Si Ming n’est plus en vie aujourd’hui, les chercheurs continuent à l’étudier, pour découvrir le secret de sa longévité, mais pas seulement.
En l’analysant, les scientifiques sont capables de mesurer la température de l’eau au moment de la formation d’une strie de croissance. Tout cela aide à retracer l’évolution climatique de l’Atlantique Nord ces 500 dernières années. Comme quoi, les rides racontent toujours une histoire !
Alan Wanamaker, paléoclimatologue de l'université de l'Iowa, étudiant les coquilles de praire d'Islande. Photo : Bob Elbert
“Le secret de la longévité, c’est de continuer à respirer.” Bruce Lansky